Accueillie à Lyon depuis juillet 2024, Agnès nous raconte avec pudeur son parcours : une famille toxique, un diagnostic de stérilité… et aujourd’hui maman d’un merveilleux petit Emsley (le 200ème bébé à être né au sein d’une colocation Marthe et Marie) !
« Voici quelques semaines à peine que je suis en couple. Je constate un retard de mon cycle sans toutefois m’alarmer. Je soupçonne une grossesse et je chasse immédiatement cette idée de ma tête. Je me positionne de profil face au miroir, mettant ma main sur mon ventre, imitant une femme enceinte. Je secoue la tête et pense à autre chose. Déjà plus de 10 jours de retard dans mon cycle…
Le 21 mai 2024, je décide de faire un test de grossesse et celui-ci s’avère positif. Plus l’ombre d’un doute, je suis bel et bien enceinte. Je fonds en larmes, ce n’était pas prévu, je n’ai pas d’emploi et cela ne fait que quelques semaines que je connais mon partenaire. Les questions se bousculent dans ma tête. Comment cela a-t-il pu arriver étant sous contraceptif ? Comment vais-je faire avec ce climat familial toxique dans lequel je vis ?
Je décide d’appeler des proches afin de leur annoncer la nouvelle et leur demander conseil. Certains se réjouissent de cette nouvelle, d’autres non. J’en parle à mon conjoint qui est stupéfait mais accueille la nouvelle avec joie, me suppliant de mener ma grossesse à terme malgré les difficultés que cela peut engendrer. Aux amis qui me conseillent d’interrompre ma grossesse, je leur réponds que cet enfant sera ma bouée de sauvetage. En leur disant cela, mon choix n’est pas encore fait. J’ignore encore quoi faire.
Je contacte le 115 en leur expliquant la situation et l’inconfort que je vis dans ma famille. Plus tard, celui-ci m’oriente vers un planning familial auprès duquel je prends immédiatement rendez-vous. Je suis reçue par une professionnelle qui m’oriente vers un centre médical afin d’effectuer une échographie venant confirmer ma grossesse. À la vue de ce petit embryon qui grandit en moi, je me conforte dans l’idée de le garder malgré l’avenir incertain, mais surtout parce qu’il m’avait été dit que je ne pourrai pas avoir d’enfant naturellement. Je promets donc à mon conjoint de garder le bébé.
Les jours qui suivent, je cogite, je veux fuir. Mais par où commencer ?
Je me tourne donc vers ma conseillère France Travail qui, touchée par ma situation, m’oriente vers une assistante sociale. Au gré des différents entretiens, nous convenons d’une après-midi après le travail pour déménager mes valises faites depuis des jours.
Dans un premier temps et pendant une dizaine de jours, je suis logée dans un hôtel, puis dans une auberge de jeunesse où les conditions de séjour dans la chambre étaient plus que déplorables et où je craignais pour ma sécurité et celle de mon bébé.
Les semaines passent et mes rapports avec le père de mon bébé se dégradent à tel point que nous finissons par rompre tout contact.
[…] Je décide d’effectuer des recherches sur Internet. […] Je tape dans la barre de recherche « foyer pour femmes enceintes ». Je me saisis d’une feuille et d’un stylo sur lequel j’inscris les noms des différents foyers figurant à l’écran. Je décide de les contacter un à un mais aucun d’entre eux ne me répond.
Ce n’est que quelques jours plus tard qu’Emmanuelle, responsable de la colocation Marthe & Marie de Lyon, me recontacte. S’en suivent différents entretiens. Je suis invitée au dîner de coloc du lundi où je rencontre les membres de la colocation et où je visite ma potentielle future chambre. Je suis touchée par l’esprit de famille et la convivialité qui y règnent. Convaincue et séduite par l’aventure et avec l’accord d’Emmanuelle, j’intègre la colocation Marthe & Marie le 29 juillet 2024.
Au moment où j’écris ces lignes, je me souviens de tout ce que j’ai vécu à Marthe & Marie jusqu’ici : une intégration incroyable, j’ai tissé des liens d’amitiés solides, qui sont voués à durer. J’ai fêté mon anniversaire entourée de personnes incroyables. Le même jour je célébrais aussi la découverte du sexe de mon bébé : un garçon.
J’ai aussi été invitée au mariage d’une ancienne coloc devenue amie proche. J’ai fait la rencontre d’anciennes mamans, volontaires et bénévoles. Parmi elle, celle d’Audrey m’aura marquée. Maman solo et assistante de Greffe à la Cour d’Appel, elle me confortera dans l’idée de poursuivre mon projet professionnel, celui de devenir greffière en présentant le concours.
Le 18 janvier 2025, Emsley naît. Quelle joie et quel bonheur, je suis épanouie ! Je suis prise de doutes car les nuits sont difficiles et je me découvre dans un nouveau rôle dans lequel je veux bien faire. Plusieurs fois je craque avec la fatigue, l’impression de ne pas comprendre les besoins de mon fils et cette solitude qui m’opprime. Je peux compter sur le soutien du père avec qui nos rapports aujourd’hui sont très cordiaux et paisibles, et sur le soutien sans faille des volontaires dont je salue l’engagement auprès de nous, les mamans.
L’expérience Marthe et Marie, c’est aussi recevoir des dons, du temps, des cadeaux de personnes que vous ne connaissez pas, que vous n’avez jamais rencontrées mais qui pensent à vous et à votre bébé. C’est se voir moucher le nez par les bénévoles lorsque nous pleurons de douleurs en raison des contractions, prendre le relai avec bébé pour que nous puissions dormir, prendre une douche ou simplement aller faire pipi. De simples petits besoins qui nous aident, nous les mamans, au quotidien.
Aujourd’hui, cette association dont je fais fièrement partie m’aura beaucoup apporté : avec l’aide d’Emmanuelle et d’autres professionnels, j’ai obtenu un refuge. J’ai pu mener ma grossesse à terme sans stress ni pression, sans inquiétude financière et avec un soutien et une assistance inébranlables.
Cette expérience, qui tristement s’achèvera bientôt, m’aura permis de grandir, de mûrir, de cultiver la patience et l’humilité. J’y ai rencontré une famille. C’est ici que j’ai appris ce que c’était que l’amour. »